Nettoyeur du net pour 9,90′ : une e-reputation au rabais?
Depuis quelques temps on voit fleurir dans la presse et sur la toile quantité d’articles à propos des « nettoyeurs du net ». S’il est vrai que le terme choisi vise surtout à vulgariser notre profession, on ne peut pas s’empêcher d’être agacé par certains raccourcis. 50A souhaite prendre la parole et rétablir un peu la vérité sur ce qu’on essaye de vendre au grand public.
Le web est un organisme vivant, constamment et chaotiquement alimenté par ses utilisateurs et rien ni personne ne peut prétendre le contrôler ni le juguler. Ne pouvant aller à l’encontre de cette autorégulation, on sourit forcément quand on entend parler de « nettoyage ». Le nettoyage sous-entend javel, blanchiment voire dissolution à l’acide si on s’appelle Léon. Quand elle est nettoyée, une tâche ne menace jamais de réapparaître si on soulève le tapis. En e-reputation, si, il y a toujours un risque.
C’est pourquoi chez 50A plutôt que de se définir en nettoyeurs, on préfère le terme de sculpteurs. D’abord pour sa dimension artistique, car, il faut le savoir, tailler une e-réputation sur mesure c’est tout à un art. Aussi pour sa dimension temporelle, puisqu’on ne peut pas affirmer que la sculpture résiste au temps qui passe, il faut toujours l’entretenir.
Vers un personnal branding et une e-reputation pour tous?
Au terme de nettoyeur s’ajoute un chiffre : 9,90.
En euro, par mois, c’est ce que propose l’agence Reputation Squad en partenariat avec l’assureur SwissLife pour protéger l’e-reputation des particuliers. Vu l’utilisation massive de Facebook ces dernières années, excitant d’autant plus les internautes à se soucier du quand dira-t-on virtuel, à quoi correspondrait un tel service aux particuliers ?
Un contrat d’engagement d’un an tacitement renouvelable. Alors bien entendu, comme n’importe quelle assurance, ça devient utile quand on a un pépin. Pour 120′ par an, peut-on se rassurer d’avoir une e-reputation en béton, entre les mains d’un assureur suisse et une agence de spécialistes ?
Avant d’y répondre il faut tenir compte des principales conditions générales
- L’attaque ne doit pas être liée à un contenu que vous auriez créé ou approuvé (une vidéo ou photo postée par vous)
- L’assureur n’interviendra pas si l’on s’attaque à votre vie professionnelle ou associative ou résultant d’un mandat électif ou d’une activité religieuse (prêtre, imam ou rabbin)
- Il n’y a pas de veille automatique pour alerter l’assuré, c’est à lui de faire sa propre veille. En cas de problème, c’est à lui d’entreprendre la démarche auprès de SwissLife.
- L »assuré ne pourra bénéficier d’une intervention juridique que dans certains cas, l’injure ou la diffamation en l’occurrence. Si Reputation Squad propose d’enfouir (oui tout à coup le terme nettoyage disparaît) les informations gênantes, ça ne sera effectif que dans ces cas.
- Le délai pour agir est très court : 3 mois, le point de départ de la prescription étant la publication du texte, piste audio ou vidéo injuriant ou diffamant.
Si le dossier est accepté, l’assuré dispose de 10 000′ de frais par an pour engager les poursuites judiciaires.
Quand on sait la quantité de travail nécessaire d’un community manager pour entretenir l’e-reputation d’un client, on réalise combien le champ d’action pour ce type de protection est restreint. Il implique que chaque assuré prenne en charge sa propre écoute (veille sur la toile par mots clés ou par consultation des forums), analyse les scénarios de réponse et anticipe les actions à mener pour minimiser l’impact d’un litige qui ne soit pas couvert par l’assureur (et il en a pléthore). En gros, que chacun réveille le community manager qui sommeille en lui. A ce stade, a-t-on encore besoin d’un assureur ?
L’e-reputation, c’est tellement facile!
L’assurance de ces nettoyeurs n’intervient qu’au niveau juridique. Le danger avec une telle vulgarisation de nos compétences est multiple. D’abord il banalise l’intervention juridique au moindre problème. Ceci allant à l’encontre de notre principal conseil : initier le dialogue et transformer une expérience négative en point positif, tout buzz, négatif ou positif pouvant être utilisé pour un meilleur escient.
Ensuite elle décrédibilise notre action professionnelle auprès de clients potentiels qui, conscients de telles prestations, ne comprendront plus pourquoi notre offre ne s’aligne pas à celles de la concurrence.
Enfin, elle transforme en opportunité marketing un véritable problème de société auquel des professionnels tentent de trouver une solution.
On vous donne la parole
L’e-reputation, si elle est la somme des traces positives et négatives laissées sur internet, est subjective et mérite réflexion. Rompu au travail de groupe faisant émerger l’intelligence collective qui nous est si chère, 50A organisera le « Barcamp e-reputation III » en février 2012 (inscription gratuite). L’occasion peut-être pour les membres de Reputation Squad de nous expliquer en détail l’intérêt pour le public d’une e-reputation à 9,90’/mois ?
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